quel choix entre responsabilité globale et profits à court terme ?

Les valeurs de l’entreprise en débat : 84% des européens veulent une entreprise responsable

quel choix entre responsabilité globale et profits à court terme ? Les coïncidences sont toujours étonnantes. Alors que nous débattions ce mercredi avec Thierry Welhoff autour de son livre sur les valeurs de l’entreprise à Techtoctv, un sondage réalisé par Burston Marsteller paru ce jour fait état d’une véritable défiance des européens envers leurs dirigeants (une défiance équivalente touche aussi les institutions), partant de leur entreprise. Un sondage a-propos. « Les dirigeants d’entreprise connaissent une forte chute de confiance (-48%), car les Européens estiment qu’ils ne pensent pas assez à l’intérêt général et sont avant tout motivés par leur profit personnel (48%), le profit de leur entreprise (21%) et la recherche d’une reconnaissance personnelle (14%) », détaille le communiqué de presse. Une défiance qui touche surtout les multinationales, il est vrai plus exposées médiatiquement.
Pour les personnes interrogées, « la ” raison d’être ” d’une entreprise et sa capacité à donner du sens à son action sont essentiels. » Soit de véhiculer des valeurs, souvent prônées, et donc peu transformées et incarnées de l’avis des sondés.

Des entreprises en quête de cohérence

Avec le « greenwashing », le temps est venu de parler du « valeur washing ». D’autant plus que, toujours d’après cette étude, pour 70% des français et 60% des européens, ” les entreprises et leurs porte-paroles sont malhonnêtes et la plupart des communications des entreprises sont des mensonges. » Une faillite avérée, tant en externe, qu’en interne. D’où l’importance de véhiculer des valeurs et surtout d’être cohérent dans l’action, comme il a été dit ce matin, « le pragmatisme et la performance, à l’anglo-saxonne, ne sont pas incompatible avec l’idéal des valeurs comme il est souvent dit» Prôner, défendre et incarner des valeurs n’est pas un obstacle pour nos interlocuteurs, on peut être dans une politique et des valeurs liés au développement durable et faire du profit. La dichotomie souvent révélée entre les deux,sphères culturelles et pragmatiques, ne serait qu’une vue de l’esprit.

Toutefois, au-delà de ce besoin de cohérence, on peut aussi s’interroger s’il n’y a pas une véritable difficulté à élaborer des valeurs, structurantes pour l’entreprise, dans un monde en plein questionnement.
Comme j’ai eu l’opportunité de le dire ce matin, aujourd’hui les entreprises vivent un nouveau point d’inflexion, obligées à tourner la page du fordisme pour aller vers un modèle en réseau et subir l’accélération des temps (économiques, financiers, géographiques, culturels etc.). A ce changement de modèle elles doivent aussi répondre aux multiples injonctions que sont l’agilité, la transparence, la confiance, l’exemplarité, la satisfaction des actionnaires, la rentabilité, l’épanouissement des collaborateurs et l’hyperconcurrence dans un contexte de raréfaction des ressources, de crise systémiques de plus en plus rapprochée et de croissance éphémère sinon volatile.

Etre inspirationnelle ?

Une position «aporétique » pour les entreprises qui sont en plus sommées de « donner du sens », non seulement à leur action, mais aussi à leurs collaborateurs pour qui elles doivent être « inspirationnelles ». Un dernier point qui s’explique sans doute par la porosité entre vie privée/vie professionnelle, mais aussi par la volatilité des emplois. On ne fait plus toute sa carrière dans la même entreprise et les attentes de part et d’autres sont différentes du fait de ces évolutions et des nouvelles réalités.
Dans ce contexte, les valeurs doivent répondre et suivre les évolutions socio-culturelles pour répondre à cette dynamique de civilisation où règnent l’incertitude et l’anxiété. Outre un rôle d’adhésion, elles doivent faire converger les énergies collectives pour créer un nouvel élan vers un avenir désirable.

Vaste tâche ou les multiples injonctions créent potentiellement une impasse pour les décideurs, cette fameuse aporie. Pour les optimistes, la sortie de cette voie sans issues apparentes se fera par un changement de modèles et une prise conscience suffisante des décideurs sur un retour aux valeurs, mais aussi à la culture d’entreprise dans ce qu’elle a de structurante dans sa relation aux diverses parties prenantes et agents économiques. Pour le dire plus simplement, en exposant ses valeurs et en s’appuyant sur ses fondamentaux culturels, l’entreprise peut potentiellement fédérer les énergies et susciter l’adhésion et s’inscrire dans un mouvement positif.

A contrario, si l’hypothèse et la politique de la terre brûlée, pratiquée du fait du court-termisme et du social washing perdure, tout comme l’incompréhension persistante du modèle en réseau, cette crispation sur un modèle obsolète, risque de voir un accroissement de la défiance envers l’entreprise et plus avant du modèle idéologique en place.

Pour conclure, entre optimisme béat et cynisme, on peut aussi s’interroger sur un point. N’en demande-t-on pas trop aux entreprises ? Après la faillite du spirituel et du politique, ne sont-elle pas une sorte de nouveau référentiel et à ce titre, les valeurs qui lui sont demandées d’incarner un substitut et un palliatif aux désordres issus de ces abandons et de ces pertes idéologiques. Comme un dernier rempart face aux incertitudes exitentielles.

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